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Psaumes 137.1-7
La lecture du livre des psaumes est comparable à une promenade en voiture sur une petite route de campagne, tranquille et au milieu d’un paysage pittoresque. Nous découvrons de chaque côté des vues magnifiques et même spectaculaires. Chaque début de psaume fait penser à un croisement de routes. On arrive, on regarde distraitement les panneaux et on continue avec une impression de déjà-vu parce qu’il faut bien le reconnaître, les psalmistes expriment souvent les mêmes idées, ce qui fait que de chaque côté de la route, le paysage est à peu près le même. Ces répétitions sont particulièrement vraies à partir du Psaume 120 jusqu’au psaume 134 qui constituent ensemble les 15 « cantiques des montées » chantées lors des trois grandes fêtes religieuses juives de la Pâque, Pentecôte et des Tabernacles.
Nous continuons notre chemin et arrivons maintenant au Psaume 137. À cette intersection, il nous faut vraiment ralentir parce qu’il s’y trouve trois panneaux lumineux qui indiquent : « Stop, Regarde, Écoute ». On s’arrête donc pour constater que le Psaume 137 est différent des autres. C’est à la fois un chant plaintif et un psaume imprécatoire violent qui prononce une malédiction effrayante sur les ennemis d’Israël.
La première strophe, d’une haute poésie, est l’expression parfaite de la douleur patriotique et de la dignité dans le malheur (v. 1-3). Puis la complainte du début fait place à des accents vibrants et menaçants à mesure que le souvenir de Jérusalem se présente plus vivement à l’âme du psalmiste (v. 4-6), parce que réveillé par l’invitation des vainqueurs à chanter les cantiques de Sion, ce qui fait que c’est par une imprécation que se termine le psaume (v. 7-9).
L’épouvantable menace de la fin : « Heureux qui saisira tes nourrissons pour les briser contre le roc ! » (v.9) fait partie des passages des Textes Sacrés qui choquent profondément notre conscience. Cette menace donne la chair de poule et fait penser à un volcan en éruption qui crache un feu de vengeance. À lire de telles paroles, on s’interroge ici encore, comment elles ont pu se faire une place dans les Saintes Écritures.
Bien que ce ne soit pas exprimé clairement dans ce psaume, l’âme du psalmiste est remplie du sentiment qu’une nation comme Babylone qui a commis un tel sacrilège doit disparaître de la face de la terre sans laisser de trace ; d’ailleurs il appelle même de ses vœux un tel jugement. Cependant, le psalmiste n’a pas sombré dans une profonde rage humaine car son esprit de vengeance se termine en une prière, et il n’est jamais suggéré qu’il avait l’intention de passer aux actes ; il s’en remet à Dieu.
Néanmoins, ce psaume nous donne l’occasion de reconnaître combien l’esprit apporté au monde par Jésus-Christ est nouveau. La justice de Dieu subsiste, et l’apôtre Paul exprime dans toute sa simplicité les menaces du psalmiste quand il dit : « Si quelqu’un détruit son temple, Dieu le détruira. Car son temple est saint, et vous êtes ce temple. » (1Corinthiens 3:17). Cependant, en nous révélant les profondeurs de notre péché, ainsi que la hauteur de la sainteté de Dieu et l’immensité de sa grâce, la croix de Jésus arrête dans notre cœur et sur nos lèvres les jugements et les menaces, et nous fait désirer la repentance et le salut des coupables.
Cela dit, il faut rappeler que lorsqu’un auteur du Nouveau Testament cite un passage imprécatoire de l’Ancien Testament, il le considère comme l’Écriture dans laquelle « le Saint-Esprit, par l’intermédiaire de David, a parlé à l’avance de Judas, qui a servi de guide à ceux qui ont arrêté Jésus. (Actes 1:16 ; Psaume 69) ; Judas étant la cible du psalmiste dans le psaume 69. Cela signifie que, d’une part, la colère de Dieu exprimée par le Saint-Esprit, est une réalité et que certains hommes ou certaines nations, méritent tout à fait d’être la cible de cette colère, et d’autre part, il y a des gens chargés par Dieu de l’exprimer en langage humain.
La plupart de ceux qui lisent une imprécation passent très vite dessus comme s’ils n’avaient rien remarqué et continuent plus loin. Mais si on veut être honnête avec le texte, il n’y a pas moyen d’arrondir les angles d’une telle malédiction afin d’en adoucir la brutalité. Bien sûr, on peut toujours rejeter ce verset comme le font certains théologiens d’obédience libérale sous prétexte que le psalmiste n’aurait pas dû dire des choses aussi méchantes et dures à entendre. Mais cette attitude est intellectuellement malhonnête et hautement arrogante, car ces théologiens ont la prétention d’avoir en eux-mêmes l’autorité de décider ce qui dans les Textes Sacrés est bon à prendre et inspiré de Dieu, et ce qui ne l’est pas.
En prenant uniquement ce qui les arrange et en délaissant le reste, ils me font penser au paysan un peu simplet qui achète une vache laitière pour se faire de l’argent. Mais il se rend vite compte que nourrir le devant de la vache coûte cher. Or, comme il recueille le lait en dessous et à l’arrière, il décide de pomper cette partie lucrative de la vache et de ne pas trop s’occuper de l’autre. Mais la collecte de lait ne fait que baisser puis s’arrête. Ensuite, la vache amaigrie tombe malade et meurt. C’est un peu ce que font ces théologiens d’obédience libérale qui acceptent bien l’amour de Dieu, mais refusent d’entendre parler de sa sainteté et justice. Mais ce ne sont pas les seuls à être dénués d’intelligence spirituelle ; il y a aussi ceux qui disent croire à tout l’enseignement des Textes Sacrés, mais sans le connaître. Ça n’a pas de sens. La seule démarche honnête est d’accepter la totalité des Écritures et de faire tout son possible pour les comprendre. Pour en arriver là, aucun raccourci n’est possible ; je dois observer avec soin les règles d’interprétation qui s’appliquent à n’importe quel écrit, comme par exemple tenir compte du vocabulaire, des tournures de phrases, des circonstances de l’auteur et de ce qu’il cherche à communiquer. C’est ce que je vais faire avec le Psaume 137.
Le premier signal lumineux est : « Stop » ; le second est : « Regarde », et considère la situation d’Israël quand cette complainte fut écrite. Tous les Israélites sont alors captifs de Babylone. Les livres historiques des Rois et des Chroniques de l’Ancien Testament nous amènent jusqu’à la prise de Jérusalem par Nabuchodonosor, mais ne parlent pas des années d’exil. Puis les livres suivants d’Esdras et de Néhémie continuent le récit d’Israël, mais seulement après les années de captivité, une fois qu’une partie du peuple est retournée en Palestine. Quant aux prophètes qui ont exercé un ministère durant la période d’exil, ils parlent très peu des conditions de vie des Israélites. C’est le grand vide, 70 ans de silence, comme si l’horloge des cieux s’était arrêtée au moment de la prise de Jérusalem. C’est là qu’intervient le Psaume 137 qui a la particularité de faire la transition, d’établir un pont sur les 70 années de captivité. Ce psaume est comparable à un petit détour de route qui conduit jusqu’à un point de vue surplombant la vallée.
Après Stop et Regarde, le 3e signal lumineux est : « Écoute ». On tend l’oreille, mais au lieu de chants joyeux, on entend une complainte, car les captifs disent : « Comment peut-on chanter les chants de l’Éternel sur un sol étranger ? (V.4) ».
Le Psaume 137 rapporte l’expérience tragique mais touchante du peuple hébreu déporté, dans lequel le psalmiste manifeste des sentiments très forts et même violents. D’une part, il exprime la haine farouche des patriotes israélites contre leurs ennemis, et d’autre part, l’amour profond qu’ils nourrissent pour Jérusalem, la ville que l’Éternel a choisie comme lieu de résidence.
Commentaire biblique radiophonique écrit par le pasteur et docteur en théologie : Vernon McGee (1904-1988) et traduit par le pasteur Jacques Iosti.